Quoi que redoutable prédateur et animal dangereux pour l’homme,
le tigre apparait dans certains mouvements du Tai Chi Chuan (les 6 premiers
ci-dessous) comme un animal dominé :
Noms de mouvements du Tai Chi Chuan :
Transporter le tigre et retourner à la montagne
Transporter le tigre et pousser la montagne (Kai He)
Frapper le tigre
Pas en arrière et chevaucher le tigre
En tenant la tête des tigres (épée)
Tirer sur le tigre avec l’arc
Le léopard et le tigre retournent à la grotte (forme de
Tung Ying Chieh)
Le tigre blanc levant la queue (épée)
Une première explication de ce paradoxe est donnée par
Catherine Despeux, Taiji Quan : Technique de longue vie :
les mouvements “Transporter le tigre et retourner à la
montagne” et “Tirer sur le tigre avec l’arc”
font référence à un héros du roman de Shi
Nai-an, “Au bord de l’eau”, qui fut vainqueur d’un
tigre et repartit en l’enfourchant.
Une explication complémentaire peut être trouvée
dans l’ambiguïté de la symbolique chinoise du tigre
considéré à la fois comme un animal Yin tandis
que l'astrologie chinoise lui associe des renvoie des traits plus classiques
: force, courage et férocité.
Cette dualité de la symbolique du tigre se retrouve dans le
Tai Chi Chuan avec l’absorption (protection) et la restitution
(attaque) de l’énergie adverse, pour pouvoir “vaincre
sans force”.

Exemple 1 : reporter le tigre à la montagne
Commentaire tiré de Cheng Man Ch'ing,
Les Treize Traités de Maître Cheng sur le Tai chi chuan,
page 138 :
"Si l'adversaire m'attaque par derrière, sur ma droite
et très près de moi, et si je ne peux savoir s'il s'agit
d'une attaque de jambe ou de bras, je tourne rapidemment la taille et
sépare mes mains, la paume de la main droite vers le bas et celle
de la main gauche vers le haut.
Ma main gauche descend sur le côté gauche pour écarter
l'adversaire. Je pointe alors le pied droit, puis fais un pas vers le
coin arrière droit, pour m'y enraciner. Ma main droite brosse
le genou, la paume tournée vers le haut. Cette action a pour
but de protéger l'aine ainsi que d'enlacer la taille de l'adversaire.
Si je le manque, alors je tourne la paume de ma main gauche pour frapper
son visage. Si je le manque à nouveau, il va retirer sa main
droite et attaquer avec la gauche. Alors j'utilise le "Rollback".

Exemple 2 : reculer et chevaucher le tigre
Commentaire tiré de Cheng Man Ch'ing,
op. cit., page 174 :
"L'adversaire tente de séparer mes deux poings en les crochetant
avec ses deux mains ; il essaie simultanément de me frapper à
l'aine de son pied gauche.
Je fais aussitôt un pas en arrière du pied droit et y
porte tout le pied du corps. Mon pied gauche se retire lui aussi pour
faire un demi-pas, en ne reposant au sol, insubstantial, que sur la
pointe. En même temps, j'ouvre les poings. Ma main droite décrit
un cercle vers l'arrière et la droite pour revenir vers l'avant,
paume ouverte, au niveau de l'épaule droite, prête à
une attaque en direction de la tempe droite de mon adversaire. Ma main
gauche, elle, brosse le genou sur le côté gauche pour bloquer
le coup de pied adverse et protéger l'aine.
L'attaque adverse avait la puissance du tigre. J'ai fait un pas en
arrière pour le chevaucher."

Exemple 3 : bander l'arc et tirer sur le tigre
Commentaire tiré de Cheng Man Ch'ing,
op. cit. , page 178 :
"Si l'adversaire se replie pour contre-attaquer en poussant, je
retire ma jambe, et la déplace vers la droite. La taille tourne
vers la droite, les bras l'accompagnent en décrivant un cercle
dans le sens inverse des aiguilles d'une montre (les paumes sont ouvertes).
Au moment où ma main droite arrive au niveau de mon oreille
droite, je serre mes deux poings. Le gauche descend au niveau de ma
hanche droite pour frapper l'adversaire à l'abdomen. le droit
monte au niveau de ma tempe droite pour frapper l'adversaire à
la tempe gauche.
Les gueules du tigre" des deux poings se font face, comme pour
bander un arc et tire sur le tigre. L'application de cette posture est
une défense vigoureuse contre un adversaire très puissante."

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